samedi 22 août 2015

Vivre loin de son pays et décider de rentrer. Note d’écoute de la chanson zen yadzal (ekeke) de Mekongo President

Mekongo President - zen yadzal (ekeke) (Disques esperance ESP165523)


Dans ce partage, nous allons écouter Mekongo Président dans son chant intitulé, « zen yadzal (ekeke) »  et qui se traduit par : « le chemin du retour définitif au village ». Ce chanteur camerounais nous a laissé avant sa mort en 2014 plusieurs réflexions sur la condition africaine. Notre partage a trois parties : une traduction incomplète du chant (1) puis nous présentons a deux thèmes essentiels : (1) l’exil et (2) le retour au pays natal. Comment déploie-t-il son argumentation et que pouvons-nous penser de cet appel à rentrer au Pays.

  1. Traduction modifiable du chant « zen yadzal (ekeke)
« J’ai recherché les routes du pays. Cela fait  plusieurs années que je les ai cherchés. Le chemin du pays est tellement éloigné… qui va te consoler ; qui va te raconter quoi. Mon frère, rentre au village et vas y cultiver les champs ; toutes les brousses du pays t’attendent ainsi que tes amis et ta famille. Tu vas venir mourir de froid ici alors que le soleil brille dans ton pays. Quel froid ! qu’est ce que je fais ici ?  Le jour où je mettrai les pieds au village… ce sera définitif.  Le jour où je mettrai les pieds à Mvog-Ada, je le ferai définitivement ! Qu’est ce que j’ai en Amérique, aux USA, en Espagne, en Asie, en France ; quand je mettrai les pieds à Nkongsamba ; quand je vais prendre la voiture pour Mbalmayo, définitivement ! »


  1. L’exil
La première thématique qui parcourt ce chant est distribuée dans l’ensemble du texte. Les lieux évocateurs sont mis en évidence : l’Amérique, les Etats Unis, l’Asie, l’Espagne, la France. Cet éloignement géographique est mis en référence avec la chaleur du soleil du pays du chanteur. L’exil est ici vécu sous la forme du dépaysement. Mekongo Président s’interroge sur ce qu’il possède en Occident, aux Amériques et en Asie. La personne africaine émigrée s’interroge sur ses avoirs. Cette thématique est également reprise par Douleur, le chanteur de makossa qui affirme dans une chanson que tous les gains financiers obtenus par les Africains demeurent en Occident. L’argent sert à acheter de quoi se nourrir, se soigner et payer les taxes. Cette situation conduit justement à s’interroger sur la qualité de cet africain qui a décidé de vivre hors de chez lui : quelle est sa situation professionnelle ? Vit-il en situation de précarité ? A-t-il un travail précaire ou alors vogue-t-il incessamment entre dans des travaux provisoires ?  Du point de vue climatique, comme déjà souligné ci-dessus, le froid (hiver) qui déstabilise l’africain/e est-il la principale raison de la décision de rentrer? Le froid est-il métaphorique de la froideur des relations humaines ? Où « chacun est dans son chacun… » pour reprendre ce mot de Magic System qui dépeint ainsi l’individualisme occidental ; bien que cette pratique se répand aussi sur le continent africain. Qu’est ce qui motive donc ce retour ? Est-ce la décision pour cause d’échec ? ou alors, si le concerné décide de rentrer, est-ce parce qu’il est porté par un projet cohérent et muri de monter une entreprise sur place ?
Le volet affectif du retour est cependant présent dans ce texte où les mots sont porteurs des sentiments qu’éprouve le concerné qui décide de rentrer. Un air de nostalgie est mis en évidence par les propos tels que : « J’ai recherché les routes du pays ;  plusieurs années que je les ai cherchés. Le chemin du pays est tellement éloigné… qui va te consoler ; qui te racontera ? »
  1. Le retour au pays natal :
 Il est exprimé en une invitation sous la forme d’une injonction : « Mon frère, rentre au village, et vas-y cultiver les champs ; toutes les brousses du pays t’attendent ainsi que tes amis et famille ».
Le mbeinguiste à qui il est demandé de rentrer au village est donc invité à retrouver son village natal. La métaphore de la brousse le situera dans le monde rural où il mettra ses forces transformatrices. Est-il préparé ? Est-ce par dépit ? A-t-il les compétences nécessaires pour rentrer ? Qu’a-t-il acquis comme compétences sur place ?
La réserve que nous avons par rapport à cette chanson est qu’elle est formulée au futur. Sans doute que le chanteur invite toute personne qui vit cette situation à devoir se préparer sérieusement à un retour définitif : sous quel mode ?

Akono François Xavier

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