mercredi 21 janvier 2015

La personne humaine aime-t-elle la raison et la vie ?

La personne humaine aime-t-elle la raison et la vie ? 

Je me demande s’il ne nous faut pas questionner quelques notions léguées par la tradition scolaire et académique.   
je questionne tout d'abord Aristote pour qui  l’homme est un animal politique  doué du langage raisonnable ; la seconde notion interrogée, je la prends  sur la base de compréhension d’un aspect mis en évidence par quelques penseurs, philosophes et théologiens d’Afrique et africanistes  (Tempels, Mveng, Mulago, Mbiti); à savoir, la vie comme socle de compréhension de l’existence quotidienne de nos terroirs. Je questionne ces notions sur la réalité des faits du terrorisme et de l’observation des morts inutiles liées à la mauvaise politique d’accaparement du pouvoir. Si la raison est la faculté de penser, de méditer et de comprendre le monde afin de devoir s’orienter, il sied de s’interroger. L’homme est-il doué de raison ? Les langages de la force ne sont-ils pas à l’opposé de la vie humaine ? La déviation volontaire de la question du « est-elle » au « aime-t-elle » vise un renversement ; on a trop pensé l’être et on a oublié « l’amour » ; or, poser son existence en termes qui questionne si j’aime me permet d’orienter l’existence par les tonalités affectives de ce qui anoblit le soi et l’autre. 
Ce cadre posé, deux questions m’orientent : la personne humaine aime-t-la raison ? La personne humaine aime-t-elle la vie ? 

Aimer la raison ou la déraison ? 

Je prends l’une des figures polémiques de l’humanité, à savoir le terroriste. Est-il doué de raison ?  Il n’a peut être pas lu Aristote ; mais du fait qu’il ait la même apparence que le « bipède raisonnable », que physiologiquement il ait un cerveau reconnu comme l’organe de la réflexion, il faut s’interroger. S’il a un cerveau, à quoi emploie-t-il son cerveau ? A concevoir des plans d’attaque ? A vouloir, conduire les autres de force à sa « foi » ? A faire du monde des humains des croyants par la force brute ? A détruire les édifices de « foi » des autres ? Est-ce à cela que sert la raison ? La raison sert-elle à fabriquer des armes à feu qui détruiront la vie de l’autre ? La raison sert-elle à employer la violence gratuite pour défendre une cause qui est de soi seul connu ? Est-elle l’organe qui médite sur la domination du monde par la construction d’outils mortifères à la grande joie de l’industrie des armes qui avance  et augmente son compte bancaire ? Puisque, pour que les humains satisfassent leur instinct destructif, il faut bien acheter les armes et les employer. Il est difficile de conclure que la personne humaine  soit douée de raison ; est-il fou ou folle ?

 Si l’intelligence est mise dans l’orientation du mépris de soi et des autres, peut-on affirmer que cette intelligence soit au service de la raison ? Si la raison demeure une faculté, elle doit s’exercer ; elle devrait réaliser ses possibilités ; la réalisation des possibilités revient à ramer à contre courant de l’animalité qui est destruction, instinct belliqueux et habitation de la noble place qui construit et milite en faveur de l’effectuation des capacités à construire des espaces de et pour la vie. Au regard des paragraphes qui précèdent, il est ardu de conclure que le terroriste aime la raison ; et qu’il chérit plutôt la déraison.

Aimer la vie ou la mort ?

Pour questionner si réellement l’africain et l’humain tout court aime la vie, je m’appuie sur l’article 4 de la Déclaration africaine des Droits de l’homme et des peuples qui stipule : « La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l'intégrité physique et morale de sa personne: Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit. »  (Charte Africaine des Droits de l’Homme et des peuples) L’actualité nous prouve pourtant le contraire. Si tel est le cas, je m’interroge donc de manière suivante : « est ce que les premiers penseurs africanistes et d’Afrique (Tempels, Mulago, Kagame, Mveng, Hebga, Hountondji,  Eboussi Boulaga, etc) se sont trompés  en inscrivant la vie  (dans ses multiples contours vie avec les autres, vie pour les autres, hospitalité, solidarité) comme base de compréhension de la vision du monde des africains ?

Ce que j’observe, c’est une certaine mutation ;  je vois des morts semés et répandus à la fois par le terrorisme et la police qui tue les manifestants contre la mauvaise politique. Si tel est le constat empirique, il convient donc d’affirmer que ce n’est plus  « la force vitale » (Tempels relisant les Luba) ; mais la force brutale qui est exercée.  Ces deux catégories, le terroriste le pourri-tique,  brutalisent la vie des citoyens ; ils ne la respectent guère. Respecter la vie de chacun revient à le laisser « vivre sa vie » ; c'est-à-dire à exercer ses capacités de résolution des problèmes liés à son environnement ; il ou elle veut bien vivre. S’il manifeste son mécontentement, par la voie de la casse, n’est ce pas qu’il est excédé ? Qu’il ou elle se rend compte que sa vie est méprisée ? Il n’a pas de quoi se vêtir, de quoi payer ses études, de quoi travailler après ses études universitaires ; quelle est la qualité de sa vie ?


Si la personne humaine commence à aimer la raison ; si la personne humaine commence à aimer la vie, je pense que l’humanité fera un grand bond. A revers, la personne humaine qui déchoit de son humanité (Eboussi Boulaga) devient banale ; sa vie risque ne pas avoir de l’épaisseur ; cette personne aura traversé l’existence en fantôme. « Les gens (pourri-ticiens ; terroristes)  là nous prennent pour de vrais paplés ! (fous) » « ils nous prennent pour des mbout (gaous) » ; or, la force du gaou réside dans  l’esprit critique. 
                                                                                                                                          Akono François-Xavier.